Joseph AMBOUROUE AVARO

17 août 1934 – 17 novembre 1978

Portrait réalisé par : FOLIVI ROPIVIA Lionel, KEMBA Excellent, MAROUNDOU MBOUROU Shelly, MBANA Hans Warren, MBOUGOU KOUMBA Caleb, MOUTETE NDZENGUE Pacôme Garcia, NGWABYT Jessy Lise, PLACCA MBOUROU Christina

Supervisé par : BOUASSA Alain Rodrigue, Professeur Documentaliste, MOUSSOUNDA Fidèle, Professeur d’Histoire-Géographie, OGOULA ENOMBO Alain D., Professeur d’Histoire-Géographie

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JOSEPH AMBOUROUE AVARO : L’HOMME

Naissance

Joseph AMBOUROUE-AVARO est né à Port-Gentil, le 17 août 1934, de Pierre-Auguste AVARO et de Flavienne NWENIMBA. Aîné d’une famille de quatre enfants, c’est dans ce cadre et sous le regard bienveillant de sa mère, qu’il se forge sa personnalité. A en croire ses proches, Joseph était quelqu’un de souriant et d’intègre.

Parcours scolaire

Joseph AMBOUROUE-AVARO entreprend ses études primaires dans les années 1940 à l’école Mont-Fort de Libreville. Il y obtient le diplôme du Certificat d’Études Primaires et Elémentaires (CEPE).

C’est donc au collège Bessieux qu’il poursuit ses études jusqu’à l’obtention du baccalauréat série D. Si au départ il opte pour des études de médecine, il suivra les conseils d’un de ses oncles qui avait le souhait de voir plus d’enseignants pour former localement les cadres et les élites qui développerons le pays et d’historiens pour retracer la mémoire collective.

Joseph AMBOUROUE-AVARO obtient une bourse d’Etat pour étudier en France et entame donc des études supérieures en Histoire à l’Université de la Sorbonne à Paris en 1956. Pour des raisons extra-universitaires, cette bourse lui est supprimée. Il doit compter alors sur ses propres forces. C’est donc en travaillant qu’il décroche brillamment sa licence, puis son diplôme d’études supérieures en Sciences Politiques et enfin son Doctorat 3e cycle d’Histoire avec pour thèse « Un peuple gabonais à l’aube de la colonisation : le bas Ogowè au XIXe siècle ». Il devient ainsi le premier historien gabonais.

Situation matrimoniale

Joseph AMBOUROUE-AVARO était marié et père de six enfants. En effet, le 17 septembre 1977 en toute intimité, il convole en justes noces avec Alphonsine KAVIO MPAGA.. De leur union naîtra deux enfants (Achille REBELA OZOUA AMBOUROUE-AVARO, né en 1975 et Michael RONOMBIGOUA AMBOUROUE-AVARO, né en 1976) . Mais avant d’épouser Alphonsine, Joseph avait déjà des enfants :

  • Patricia AMBOUROUE-AVARO, née en 1965 ;
  • Anne Elisabeth NGWIWENGA AMBOUROUE-AVARO, née en 1967;
  • d’une mère anglaise rencontrée lorsqu’il était étudiant ;
  • Suzanne NKOLO AMBOUROUE-AVARO, née en 1973 ;
  • Yves MBANIE AMBOUROUE-AVARO, né en 1975.

JOSEPH AMBOUROUE AVARO : L’HOMME DE SCIENCE

L’œuvre

Joseph AMBOUROUE-AVARO a appartenu à la première génération des Gabonais qui ont entrepris de reconstruire le passé de leur pays. Sa principale œuvre est tirée de sa thèse de Doctorat 3e Cycle : Un peuple gabonais à l’aube de la colonisation : le Bas-Ogowè au XIXe siècle, publié à titre posthume en 1981, aux Editions Karthala.

Dans cette œuvre, l’auteur s’attache à situer la crise culturelle qui a accompagné la colonisation et la difficulté des Gabonais à reconstruire leur personnalité. « AMBOUROUE-AVARO a opéré une véritable percée qui a permis de mieux appréhender la vision interne des sociétés africaines et la logique de leur évolution ». L’ouvrage de Joseph AMBOUROUE-AVARO «dégage le sentiment d’un combat urgent et nécessaire à mener pour rendre la primauté, dans un cadre évidemment chargé, aux valeurs d’usage et à la convivialité, caractéristiques des cultures et des sociétés africaines ».

L’étude de Joseph AMBOUROUE-AVARO est d’une importance avérée. C’est le premier travail réalisé par un historien gabonais. En outre, sans l’avoir clairement formulé, l’auteur insiste sur la nécessité de revenir sur les valeurs ancestrales pour bâtir le Gabon.

Reconnaissant les mérites de cet homme de science, le monde de l’éducation lui a témoigné sa reconnaissance en baptisant de son nom, d’une part à Port-Gentil une école à cycle complet de près de 1000 élèves et un lycée public qui accueille 3 300 élèves ; et d’autre part à Libreville, un foyer à l’université Omar BONGO.

Les projets de recherche

Brillant enseignant d’histoire, Joseph AMBOUROUE-AVARO était aussi un chercheur émérite. Il entama une profonde réflexion sur différents sujets :

  • La périodisation de l’histoire africaine ;
  • Les indices de datation que contient la tradition orale ;
  • Les grandes lignes de l’histoire du Gabon ;
  • Une possible comparaison entre les structures des sociétés de la Grèce archaïque et celles des sociétés africaines.

Toutes ces pistes de recherche ne furent, malheureusement, pas menées à terme, ce qui ne l’a pas empêché de faire des communications aux différents colloques ou conférences internationaux auxquels il participa.

Grâce au Fonds International pour la Promotion de la Culture et à Karthala. Le livre est publié en 1981 sous le titre : « Un Peuple Gabonais à l’Aube de la Colonisation : le Bas-Ogowè au XIXe siècle ».

La thèse “ Un peuple gabonais à l’aube de la colonisation : le bas Ogowè au XIXe siècle ” un classique pour les chercheurs en sciences humaines.

Archive : Le Monde Diplomatique, Juillet 1981, Les livres du mois, p25

JOSEPH AMBOUROUE AVARO : L’ENGAGÉ

L’étudiant militant

Un an après son arrivée en France, soit en 1957, il rejoint les rangs de l’Association générale des étudiants gabonais (AGEG) mais aussi ceux de la Fédération des étudiants d’Afrique noire en France (FEANF) et en devient un membre influent de l’Association Générale des Etudiants Gabonais (AGEG) puis de la Fédération des Etudiants d’Afrique Noire en France (FEANF). Ces deux associations, qui sont engagées contre l’inféodation des pays africains à la métropole française, forment à la contestation et revendiquent la liberté et l’indépendance totale.

Une fois rentré au Gabon, à l’Université, il appartient au courant des enseignants engagés qui compte dans ses rangs, entre autres, Pierre-Louis Agondjo Okawé et Joseph Rendjambé. En 1972, il échappe de peu à la vague d’arrestations.

En effet, le contexte politique fait d’intimidations, de suspicions et d’arrestations arbitraires révoltent l’intelligentsia gabonaise et notamment le monde universitaire qui est constitué essentiellement d’anciens membres de l’AGEG, de la FEANF et du MGAP et pour qui la contestation reste l’unique moyen de se faire entendre par un régime qui se radicalise au point de pratiquer les assassinats politiques, la peine capitale et l’exil.

Ainsi, durant cette année, des étudiants et des leaders d’opposition eux aussi enseignants à l’Université nationale du Gabon, sont arrêtés. C’est le cas de Joseph Rendjambé ou encore de Pierre Louis Agondjo Okawé. Néanmoins, Joseph Ambourouet Avaro fut interpellé et soumis à un interrogatoire coriace mené par le sulfureux ex-policier français et agent des renseignements généraux gabonais, Georges Conan.

Il faut aussi souligner que malgré son engagement estudiantin et dénonciateur, il bénéficie d’une bourse d’Etat pour ses études, ce qui était certainement dû aux privilèges dont jouissait son père auprès de Léon Mba.

Mais cette aide financière étatique dont il est détenteur lui sera vite retirée, en synonyme de châtiment aux contestations anticoloniales et dérangeantes dont fait montre la classe étudiante noire dans l’hexagone. Une sorte de « chasse aux sorcières » est diligentée par les autorités administratives françaises en tête desquelles le ministère français de l’éducation nationale pour faire taire toutes ces revendications acrimonieuses qui gênent considérablement la métropole française.

L’intellectuel engagé

Il commence sa carrière professionnelle en France aux lycées Jean Macé, à Chauny et Rémi Belleau à Nogent-Le-Rotrou où il enseigne l’histoire et la géographie.

Rentré au Gabon en 1969, Joseph AMBOUROUE-AVARO enseigne au Lycée National Léon MBA en tant que Professeur d’histoire-géographie, puis à l’Ecole Nationale d’Administration (ENA) et enfin au département Histoire de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines de l’Université Nationale du Gabon.

Le retour au pays n’a pas entamé la détermination de Joseph de voir s’établir au Gabon une société juste. Il était conscient des mauvaises conditions de vie de ses compatriotes. Ses prises de position n’ont pas toujours été appréciées par le pouvoir.

Dans l’exercice de ses fonctions, selon ses collègues, élèves et étudiants, «il fit la preuve de sa compétence pédagogique, de la maîtrise de sa matière et de son cours, de la rigueur de sa pensée et de son honnêteté intellectuelle malgré les conditions difficiles de travail ».

En 1972, Joseph Ambourouet Avaro avait échappé de peu à une vague d’arrestations suite à sa position politique qui était bien distincte de celle de plusieurs de ses pairs enseignants. En effet, il y avait au sein de l’Université nationale des enseignants, « ex » membres de l’AGEG, inféodés au régime Bongo et d’autres, qui étaient restés campés sur le combat estudiantin et citoyen qui visait à défendre l’autonomie et la liberté du Gabon et des Gabonais. Plusieurs complots sont donc fomentés pour discréditer voire éliminer physiquement les « récalcitrants » au régime politique de l’époque.

Durant cette année, des étudiants sont arrêtés ainsi que des leaders d’opposition eux aussi enseignants à l’Université nationale du Gabon. C’est le cas de Issani Rendjambé ou encore de Agondjo Okawé. Plus tard, Ambourouet Avaro fut interpellé et soumis à un interrogatoire coriace mené par le sulfureux ex-policier français et agent des renseignements généraux gabonais, Georges Conan. Les autorités disaient craindre une conspiration communiste ourdie par des anciens membres de l’AGEG mais qui curieusement n’avaient pas rejoints les rangs du parti au pouvoir.

Ses anciens compagnons de lutte affirment qu’avec l’ouverture démocratique au Gabon, il aurait continué la lutte pour défendre les idéaux auxquels il était attaché.

En 1975, il est nommé, par les autorités politiques, Doyen de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines. Malgré ses compétences, Joseph AMBOUROUE-AVARO n’occupera pas longtemps ce poste.

En mars 1978, à la suite d’une grève déclenchée par les étudiants pour protester contre leurs mauvaises conditions de vie et d’études, il est remercié puis nommé Directeur de la Coopération universitaire. Un poste purement formel. Sans bureau.

17 novembre 1978 : La disparition

Joseph AMBOUROUE-AVARO disparaît tragiquement ce jour à 44 ans dans un accident d’avion dont il était aux commandes, entre Port-Gentil et Libreville. Les recherches de l’épave de l’avion ont duré trois jours. Seuls les corps de Joseph et d’un passager ont été retrouvés. Les trois autres passagers ont été portés disparus. Joseph AMBOUROUE-AVARO repose au cimetière central de Port-Gentil. Les circonstances du crash de l’avion n’ont jamais été élucidées.

Repères bibliographiques

PUBLICATIONS

  • Un peuple gabonais à l’aube de la colonisation. Le bas-Ogowè au XIXe siècle, Joseph AMBOUROUE-AVARO, Paris, Karthala, 1981, 285 p.
  • Centrafrique, Congo, Gabon, Collection Guides touristiques de l’Afrique, Sous la direction de Jean Devisse, Joseph Ambouroue Avaro, Paris, Hatier, 1979, 144 p.

Pour aller plus loin…

À lire

  • Histoire du Gabon, Des origines à l’aube du XXIème siècle, Nicolas Metegue N’Nah, L’Harmattan, 2006, 372 p.
  • Le Flambeau, Journal du lycée Joseph Ambouroue Avaro, N° 07 d’avril 2007
  • Le choix de l’Afrique : Les combats d’une pionnière de l’histoire africaine, Catherine Coquery-Vidrovitch, La découverte, 2021, pp 170-197