Par : La Résistance Gabonaise
À l’attention de : Emmanuel Macron, Président de la République française
Date : 7 décembre 2017
Objet : A l’occasion du One Planet Summit
Monsieur le Président de la République,
Le 12 décembre prochain, la France, à votre initiative, accueillera le sommet international « Finance et climat » (One Planet Summit) dans le but de mobiliser la finance mondiale dans la lutte contre le réchauffement climatique. Plusieurs dizaines de personnalités de tous horizons, et intéressés par l’environnement comptent participer à cet événement majeur, et notamment M. Ali Bongo Ondimba, au nom du Gabon.
Nous, peuple Gabonais, nous nous insurgeons contre la participation scandaleuse de M. Ali Bongo Ondimba à ce sommet.
Ali Bongo Ondimba occupe la fonction de chef d’Etat de manière illégitime.
En effet, après son père Omar Bongo Ondimba resté au pouvoir 42 ans, un premier coup d’Etat en 2009 l’a intronisé. Il a ensuite fraudé l’élection du 27 août 2016 comme le prouvent, entre autres, les rapports des missions d’observation électorale dépêchées à cette occasion par l’Union Africaine (UA), l’Union Européenne (UE) et l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Et, s’est livré à des massacres et à des violations massives des droits de l’Homme pour se maintenir au pouvoir.
L’un des épisodes les plus tragiques est l’attaque à l’arme lourde du quartier général du véritable vainqueur de l’élection présidentielle, M. Jean Ping, durant la nuit du 31 août au 1er septembre, occasionnant de nombreux morts et blessés. Aujourd’hui encore, de nombreuses familles continuent de rechercher les corps de leurs disparus.
Face à cette situation, le Parlement européen a par deux fois, en février et septembre de cette année, dénoncé cette forfaiture électorale et la gravité de ces crimes et exigé une enquête internationale à ce sujet. Une procédure est également en cours à la Cour pénale Internationale.
La résolution du Parlement européen du 14 septembre dernier appelle spécifiquement la France à prendre ses responsabilités dans la grave crise que traverse le Gabon. La France de l’ancien monde est intervenue à diverses reprises, y compris militairement, pour installer ou maintenir les dictateurs de ce pays contre la volonté du peuple. La France du nouveau monde doit se tenir aux côtés de ce peuple. La France du nouveau monde doit se tenir aux côtés de notre peuple. C’est le sens de votre déclaration faite en avril dernier lorsque vous étiez encore candidat : « Si je suis élu, je défendrai le respect des principes démocratiques fondamentaux partout en Afrique ». Vous, le Président de la France du nouveau monde ne pouvez trahir la parole de l’ancien candidat. Vous ne pouvez refuser, devant le Parlement européen et devant le peuple Gabonais, d’assumer la responsabilité qui incombe à la France.
La lutte contre le changement climatique est sans aucun doute le défi majeur que nous devons tous affronter. Mais elle ne peut pas se faire au détriment des peuples ni en fermant les yeux sur les atteintes à la démocratie et aux droits humains.
« Notre politique européenne ne doit plus voir l’Afrique comme un voisin menaçant mais comme le partenaire stratégique avec lequel nous avons à affronter les défis de demain : l’emploi de la jeunesse, la mobilité, la lutte contre le changement climatique, les révolutions technologiques ». Cette exhortation de votre discours sur l’Europe du 26 septembre dernier est évidemment juste, à condition de ne pas oublier que ces « défis de demain » ne pourront être relevés que dans un environnement réellement démocratique.
La présence de M. Ali Bongo Ondimba au sommet pour le climat du 12 décembre constituerait non seulement une grave offense faite aux victimes de la crise post-électorale ; mais également un soutien à une dictature qui opprime son peuple, confisque ses libertés fondamentales et l’enfonce dans une misère de plus en plus profonde en se livrant à des détournements massifs de ses richesses.
L’appui au régime gabonais actuel serait donc une catastrophe aussi bien pour la France et l’Europe que pour les Gabonais. Cela alimenterait la désespérance des populations qui perdraient confiance dans la communauté internationale et ses postures sur la promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance, avec le risque réel qu’une frange de la population décide d’opter massivement pour la migration, préférentiellement vers la France, et qu’une autre devienne sensible à certaines idéologies et certains discours violents qui déstabilisent déjà des régions entières en Afrique, en Europe et ailleurs.
Aussi, nous vous engageons à écouter la colère et les aspirations à la justice du peuple gabonais ainsi qu’à respecter et faire respecter ses choix démocratiques, comme la résolution du 14 septembre dernier du Parlement européen exhorte la France à le faire, en refusant la présence d’Ali Bongo Ondimba sur le sol français.
Veuillez croire, Monsieur le Président de la République, à notre profond respect.